2 cœurs en péniche

Publié le par Lhomville




J’avais emmené mon chien faire sa promenade quotidienne. Nous arpentions tous deux pour la énième fois le quai Sadi Carnot. Un matin qui se présentait comme un autre – avec son lot d’herbe mouillée et de cygne nageant tranquillement sur la rivière – mais qui allait au final s’avéré peu ordinaire.

Elle revenait, le vélo à la main, de Picard où elle avait (je découvris cela plus tard) acheté des haricots surgelés ; qui aime les haricots surgelés? Elle : fine, le corps musclé, des cheveux blonds attachés en un chignon rapide, la peau légèrement halée. Son regard croisa le mien alors qu’elle allait prendre la rampe d’accès à la halte fluviale. Je ne sais pas ce qui se passa alors, mais le temps sembla durer une éternité. J’avais basculé dans un autre monde. Enfin jusqu’à ce que les aboiements répétés de mon brave toutou (un Yorkshire froussard et cacochyme répondant au nom de Brutus) ne me ramènent sur terre. L'air hébété, je ne m’aperçu pas tout de suite que mon pied avait "fortuitement" rencontré un étron, fraîchement déposé là par ce cher Brutus. Je fis une grimace en tentant d'essuyer mon mocassin dans l'herbe humide. De toute évidence cela la fit sourire. Et il n’en fallut pas plus pour que l’on commence à échanger quelques mots.
Elle habitait l’un des bateaux de plaisance accosté dans la halte fluviale ; elle louait pour les vacances. Elle m’invita, en me le disant dans un français moyen (la belle est hollandaise… ou quelque chose comme ça), à monter à bord de son bateau pour nettoyer ma chaussure souillée. Je ne sais comment, mais nous avons fait l’amour. Je suis descendu du bateau deux heures plus tard (et sans le mal de mer).
J’ai passé la journée à retourner cette aventure dans ma tête, en oubliant même de me nourrir. Et puis stupide que je suis, je me rendis compte que je ne lui avais pas demandé son petit nom (quel mufle !), ni même si elle voulait me revoir. Je sorti aussitôt de chez moi pour la retrouver. Je remontais le quai par le parking, puis arrivé au pont neuf je descendis la rampe qui menait à la halte fluviale. Mais lorsque j’arrivais à hauteur du ponton d’accostage, il ne me fallut pas 2 secondes pour m’apercevoir que le bateau de l’amour avait quitté les lieux. Et comment s'appelait-il ce bateau ? 
J’écrasais la cigarette que j’avais allumé quelque secondes plus tôt, sur le mur en béton du quai. Je me fis alors remarquer à moi-même, que les jardiniers de la ville devaient s’amuser à fleurir cette affreuse jardinière aux allures de mur d’autoroute. Je repris le chemin de la maison, me demandant si je devais ou non essayer de la retrouver.

Publié dans Nouvelle

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